La conscience democratique contemporaine est heritiere de deux traditions de pensee antagonistes qui sont, d'un cote, l'universalisme des Lumieres symbolise par la Declaration universelle des droits de l'homme et du citoyen, et de l'autre le relativisme historique legue par l'Ecole historique du droit et les courants de pensee historicistes. Il tient en deux positions de principe: l'affirmation peremptoire, d'une part, de l'universalite des ideaux de la democratie et des droits de l'homme; la legitimation, d'autre part, des particularismes identitaires et socio-culturels (...) comme source constitutives de valeurs. D'ou precisement l'antagonisme entre vision universaliste et vision relativiste sur le statut axiologique de l'ideal democratique. ;C'est a cette question, redefinie a l'interieur du paradigme de la philosophie morale de Kant, que nous avons tente d'apporter une solution theorique qui fait droit aussi bien a la pretention universaliste de la norme democratique qu'a la "verite" de la conscience historique. ;L'ideal democratique ou l'Idee republicaine, s'il peut etre considere comme l'analogue politique de l'imperatif categorique, c'est d'abord parce qu'il peut etre pense, au titre de principe de l'ordre politique juste absolument, comme forme a priori de la raison, bien qu'il soit apparu dans une periode historique determinee et dans une ere culturelle particuliere, c'est-a-dire en Europe au XVIII$\rm\sp{e}$ siecle s'agissant specifiquement de l'ideal moderne de la democratie. ;Cette interpretation kantienne du statut de l'ideal democratique nous amene a prendre partie pour un universalisme formel, qui s'articule autour du lien etroit et necessaire devant prevaloir entre l'universel et le particulier. C'est ce lien que nie, en meme temps qu'elle le rompt, la rivalite traditionnelle entre l'universalisme dogmatique et le relativisme sans reserve. Aussi bien, contre le premier, l'universalisme formel inscrit l'universel dans la forme a priori de la raison comme en son lieu axiologique propre, jamais dans un contenu reel ou historique. Au second, il oppose l'horizon du formalisme kantien comme celui du discours universaliste, l'horizon qui rend possible et legitime la reference a l'universel democratique. ;C'est a cette condition qu'il nous parai t possible de justifier a la fois l'idee d'un imperatif categorique democratique et l'historicite essentielle des "experiences de l'universel" nourries par les singularismes socio-culturels et historiques. Ainsi, sommes-nous parvenu a esquisser les grandes lignes d'une interpretation kantienne du statut de l'ideal democratique, une interpretation universaliste-formaliste qui tient tete autant au dogmatisme moral qu'au relativisme sans bornes. (shrink)

Partant du principe que l’idéal démocratique est une norme universelle, la discussion au coeur de ce travail soulève une série de questions causuistiques liées à la mise en oeuvre concrète des démocratiques dans toute société humain, quels que soient ses particularismes socio-historiques et culturels. Cette démarche découle entièrement de l’hypothèse suivant laquelle le problème fondamental de la démocratisation, autrement dit de la domiciliation de l’idéal démocratique, se ramène à celui de son ap-propriation, d l’adaption du principle universal aux structures de (...) base d’une société donnée, produit de conditions socio-culturelles, religieuses, politiques et économiques. Dans le but de dévoiler l’enjeu primordial qui polarise les différents aspects de la question, nous tentons, en premier temps, de mettre en évidence la ‘particularité culturelle’ du modèle de la démocratie libérale. Cette tenative débouche, en fin de compte, sur une remise en question de la prétention universaliste de la démocratie occidentale. Nous discutons ensuite des difficult ensuite des difficultés practiques qu’entraînent l’exigence traditionnelle du multipartisme et la définition des droits et libertés de base dans tout processus de démocratisation. Notre objectif, en abordant ces différentes questions, est de faire ressortir, avant tout, le caractére inextricable, voire insoluble, des problèmes practiques que soulève l’appropriation socio-culturelle de l’idéal démocratique, lesquels problèmes imposent de recourir à une méthode d’analyse cauistique des processus de démocratisation et de ne plus se satisfaire de l’universalisme abstrait et dogmatique. (shrink)

Le formalisme qui caractérise si bien la morale kantienne demeure sans conteste un des aspects les plus critiqués de sa pensée. Pour notre part, nous nous situons ici dans une perspective qui considère que le formalisme kantien est victime d'une longue tradition critique qui a fini par perdre de vue la portée réelle, sinon l'essence même de la morale de Kant. Notre propos ne sera pas pour autant une réponse directe aux différentes critiques qui ont été adressées à Kant sur (...) cette question. Nous éviterons autant que possible ce que d'aucuns seraient tentés de qualifier de veine et anachronique plaidoirie du formalisme kantien. (shrink)